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UN LABO PUBLIC EN DANGER

Publié le par pcf23

 

Après les déserts médicaux aurons-nous des déserts transfusionnels ?

Le LFB (Laboratoire du Fractionnement et des Biotechnologies) est menacé. Ce laboratoire 100% public produit les "Médicaments Dérivés du Sang" (MDS) issus du plasma sanguin des donneurs de sang bénévoles prélevé par l’Établissement Français du Sang (EFS). En France, 500 000 malades moyenne/an en bénéficient pour des pathologies toujours graves (1) parfois rares, souvent invalidantes. C'est dire que le LFB est un outil essentiel dans le champ de la santé publique. C'est un établissement relevant de l'éthique, hors commerce et sans profit, dans un monde sans pitié ou les multinationales du commerce des produits sanguins surfent avec des milliards de dollars de chiffres d’affaires dans les pays développés. Le LFB est donc l'objet d'une bataille sourde, opaque. Si les forces dominantes sont toutes, officiellement "pour l'éthique", elles ne supportent pas que ce domaine de la santé échappe à la marchandisation.

Contrairement aux produits "labiles" (concentrés de globules rouges, plaquettes...) les MDS relèvent du champ du médicament, mesure imposée par les institutions européennes. Les MDS sont, grâce à d'obligatoires "appels d'offres" des hôpitaux, mis en concurrence avec les multinationales étrangères qui "cassent les prix" en France et se rattrapent dans le reste du monde avec de fortes marges. Par exemple, les USA ont imposé l'utilisation exclusive du plasma national sur leur territoire, le LFB n'est pas présent donc pas concurrent.

Aussi le LFB qui a perdu près de 50% de la fourniture de nos hôpitaux voit son activité déséquilibrée en particulier dans le domaine important des immunoglobulines, tombé lui au dessous de 50%. Conséquence, le bilan 2011 a été pour la première fois négatif avec une perte de 6,5 millions d'euros et la suppression de 35 emplois dans les équipes R&D, secteur pourtant crucial pour l'avenir.

 

Outre l'environnement concurrentiel sur le marché national le LFB subit de la part des autorités françaises seize exigences spécifiques de sécurité sanitaires qui ne sont pas imposées à ses concurrents. (2)

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De plus la France est le seul pays développé à déclarer les "suspicions" de Maladie de Creutzfeld Jakob sporadique (MCJs). Quand une "suspicion" de MCJs est déclarée dans la famille d'un donneur de sang, tout le "lot" de médicaments pouvant contenir du plasma de ce donneur fait l'objet d'un "retrait" et est détruit. Chaque "retrait" a un coût supérieur à un million d'euros, cinq millions d'euros pour le dernier le 4 octobre 2012 !

 

La France est le seul pays à détruire ainsi les "lots" alors que les multinationales concurrentes du LFB n'y sont pas astreintes, leur pays d'origine ne déclarant pas les "suspicions" de MCJs. C'est une discrimination inacceptable nuisible au seul établissement public français, le LFB, qui voit sa notoriété anéantie.

Si la France estime que cette mesure de sécurité sanitaire s'impose pourquoi cette "police sanitaire" ne s'applique -t-elle pas aux 50% de patients traités avec des produits importés ?

 

Aussi, à l'automne 2012, le LFB connait de graves difficultés l'amenant à diminuer ses investissements industriels et à supprimer 290 emplois "Équivalents Plein Temps" sur un effectif de 1600 soit plus de 18%.

 

Madame la ministre de la santé doit prendre ses responsabilités Depuis juin 2012, le changement est arrivé, dit-on ? Il est urgent que Mme la ministre de la santé et des affaires sociales use de son autorité pour :

 

réunir tous les services et agences concernés (LFB, EFS, DGS et ANSM ex AFSSAPS) afin d'aligner les dispositions françaises sur les pratiques des autres pays européennes et supprimer la déclarations de suspicions de MCJs, conformément à la "recommandation" N° 8 du rapport IGAS de novembre 2010

 

de demander à l'ANSM de contrôler la conformité éthique de tous les MDS importés et d'exiger la traçabilité des poches de plasma utilisées par les concurrents du LFB dans la fabrication de chacun de leurs "lots" de MDS entrant dans nos hôpitaux ("Recommandations" 5 et 6 rapport IGAS p 35).

 

Conséquence secondaire, les destructions de "lots" entrainent des "pénalités "pour l'EFS, 13 millions d'euros en 2011.

Il est scandaleux qu'au moment ou, pour cause de "crise financière", tous les budgets sont réduits, deux établissements publics soient contraints de jeter des millions d'Euros à la poubelle.

 

(1) les "déficits immunitaires ", les patients reçoivent des immunoglobulines qui remplacent les anti-corps manquants; les "déficits de coagulation", hémophilie, maladie de Willebrand ; des maladies auto-immunes, des maladies rares comme le "Déficit alfa 1 antitrypsine" à l'origine d’emphysèmes; l'albumine, l'antithrombine, le fibrinogène sont utilisés lors d'hospitalisations en soins intensifs… (2) page 91 du rapport IGAS

 

Des signes d'aggravation

Lors du CCE de l'EFS, le 13/11, la direction a déclaré vouloir vendre les machines de prélèvement de plasma devenues inutiles après la baisse de la fourniture de plasma au LFB.

S'installe-t-on en hauts lieux dans l'abandon de l'autosuffisance nationale en produits sanguins?

Après 914 750 litres en 2011, un objectif de 853 000 en 2012, la prévision de fourniture de plasma baisse à 753 000 en 2013 et tombe à 635 000 en 2014. Or le besoin de médicaments dérivés du sang augmentant,(3) le LFB a in-vesti des sommes colossales pour traiter 1 100 000 litres de plasma et va tomber … à 635 000 en 2014. Avec une telle baisse de l'activité, il sera impossible de rentabiliser les investissements.

Ainsi un établissement public français éthique, serait sacri-fié aux intérêts des multinationales et de leurs actionnaires.

 

Vers des déserts transfusionnels

Au 1er janvier 2013, la collecte spécifique de plasma sanguin à destination du LFB cessera totale-ment. Or l'activité essentielle des "sites EFS", 153 en France, est la collecte de plasma avec 74% du volume. La quasi totalité des poches de sang total (86%) est obtenue dans les "collectes mobiles" dans les salles municipales, entreprises lycées et facs.

En arrêtant la collecte plasma les petits EFS ne pourront vraisemblablement survivre et fermeront.

Mais 136 EFS sur 153 ont aussi un "service distribution" qui fournit les produits sanguins aux hôpi-taux et un "labo I H" (Immuno-Hématologie) qui réalise les analyses que demandent les hôpitaux, les deux fonctionnant 24h/24, 365 jours par an.. Qu'adviendra-t-il de ces services ? Il sera sans doute proposé de les centraliser sur les grandes villes. Et des territoires deviendront des déserts transfu-sionnels, s'ajoutant aux déserts médicaux.

 

(3) avec l'évolution des connaissances médicales et l'arrivée des "pays émergents" le besoin de MDS est partout en progression


En 2011 en France, les citoyen(ne)s solidaires ont donné 2.120.241 poches de "sang total", 466.124 poches de plas-ma, 134.241 poches de plaquettes

GLOSSAIRE/ EFS = Etablissement Français du Sang (Service public) LFB= Laboratoire du fractionnement et des Biotechnologies (100% public) DGS=Direction Générale de la Santé ( ministère de la santé) ANSM=Agence Nationale de Sécurité des Médicaments, a remplacé l'AFSSPS(Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé) après l'affaire Médiator de Servier

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